Fascination envers les sociétés autochtones
LA FASCINATION DES CANADIENS ENVERS LES SOCIÉTÉS AUTOCHTONES
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« Nos fils marieront vos filles et nous formerons qu’un seul peuple », voilà les paroles prononcées en 1633 par Samuel de Champlain devant ses alliés autochtones.
S’inscrivant dans le cadre d’une politique coloniale instaurée par le roi Henri IV et poursuivie par ses successeurs, cette volonté sincère de Champlain visait certes une acculturation des Premières Nations aux mœurs françaises. Cependant, c’est plutôt l’inverse qui se produisit, alors que ce furent les Canadiens qui, à force de les côtoyer, assimilèrent davantage les manières des premiers.
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Cette créolisation des colons s’explique particulièrement par la fascination que les sociétés autochtones exerçaient généralement sur eux. Portée par un désir de liberté et d’aventure, par une admiration de la beauté physique des Autochtones ou par un enthousiasme envers l’exotisme de leurs mœurs et coutumes, cette vive fascination facilita certainement l’adaptation des Canadiens aux réalités du pays.
Si la vie devenait trop contraignante dans les établissements de la vallée laurentienne, il leur était toujours possible de décamper dans les bois, chez leurs voisins autochtones. Les Canadiens qui vivaient parmi eux se vêtaient de leurs mêmes habits, se graissaient les cheveux, participaient à leurs danses, mimaient leurs attitudes, se mélangeaient à eux, criaient, chantaient et assistaient à leurs cérémonies en prenant part à leurs rituels. Bon nombre adoptèrent aussi le tatouage.
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À l’approche de leurs villages, pour se rendre présentables aux yeux d’une gent féminine locale accueillante, mais préférant une virilité sans pilosité faciale, les Canadiens se souciaient aussi de bien se raser les joues et le menton.
Dans un va-et-vient continuel entre ces sociétés, l’interaction entre les Canadiens et les Premières Nations fut étroite, soutenue et durable; davantage à mesure qu’on remontait le fleuve, là où la proximité avec les communautés autochtones était la plus grande. Il en résulta un métissage intime et de nombreux emprunts interculturels touchant à toutes les sphères de la vie quotidienne, qu’il s’agisse des transports, de l’habillement, de l’alimentation, de la médecine, la chasse et la pêche, du folklore ou de la langue.
Dès la fin du 17e siècle, les Canadiens avaient acquis une conscience nationale propre et ils n’étaient pas les seuls à s’en apercevoir, alors que les autorités coloniales en vinrent à les considérer comme un peuple ensauvagé.
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Dans les mots du ministre de la Marine, Louis Phélypeaux (1699) : « on ne doit pas regarder les Canadiens sur le même pied que nous regardons ici les Français, c'est tout un autre esprit, d'autres manières, d'autres sentiments, un amour de la liberté et de l'indépendance, et une férocité insurmontable contractée par la fréquentation continuelle qu'ils ont avec les Sauvages ».
Source: Marco Wingender
Crédit d’illustration : The beaver men, Paul Calle.18