Irenée Forget
D’agriculteur passionné à maire dédié, Irenée Forget a façonné les bases du Terrebonne qu’on connaît aujourd’hui. S’il est entré en politique à reculons, il s’est toujours fait un devoir de contribuer à l’avancement de sa municipalité, jusqu’à sa retraite en 1997.
Demeurant toujours dans la résidence de ses ancêtres sur la côte de Terrebonne – il est la 5e génération des Forget à y habiter –, l’ancien maire l’avoue d’entrée de jeu : «Je n’étais pas fou de politique», révèle-t-il de l’époque où il avait repris les rênes des terres du paternel. Cela ne veut pas dire qu’il manquait d’aplomb ou qu’il n’avait pas d’opinions pour autant. Le jeune Irenée s’était vivement opposé à un projet de Léon Martel, maire de Terrebonne de 1955 à 1965. Bref, il aura donc fallu le convaincre.
Après plusieurs demandes répétées, l’agriculteur, qui avait entre-temps développé une allergie aux poils d’animaux – ce qui n’est pas utile lorsqu’on possède un gros troupeau, comme celui qu’il avait –, a décidé de présenter sa candidature aux élections de 1973, encouragé par sa femme, Annette Dion-Forget.
Élu dans ce qui était à l’époque Saint-Louis-de-Terrebonne, il a succédé au maire Gilles Ouimet à son décès, en 1977, pour être réélu sans opposition en 1979 et en 1983. Lors de la fusion de Saint-Louis-de-Terrebonne à Terrebonne, en 1985, il a été élu, encore une fois sans opposition, cette même année et quatre ans plus tard. Après avoir remporté ses élections en 1993, il s’est retiré en 1997, alors qu’il était aussi préfet de la MRC Les Moulins.
Souvenirs d’un autre temps
Une fois à la retraite, Irenée Forget dit n’avoir jamais tenté de s’impliquer de quelque façon que ce soit dans le monde municipal. «Si tu vends ton entreprise, tu t’en vas. Tu n’as plus à t’en mêler, lance-t-il pour expliquer son geste. Je ne voulais pas mettre des bâtons dans les roues au nouveau maire.»
Si 20 années sont passées depuis ce temps, c’est avec bonne humeur qu’il aborde ce temps passé à la mairie, comme la période où il était agriculteur, qu’il adorait. «Un temps, je connaissais tout le monde qui avait une terre de Saint-Placide à Trois-Rivières! Je rencontre encore des cultivateurs, informe-t-il avec le regard allumé. Sur une ferme, il n’y a pas d’heures. On travaille!»
Comme à la mairie? Il répond alors d’un sourire affirmatif. «J’en avais trop à la fin. Je pouvais faire 90 heures par semaine», se souvient l’homme qui a du mal à cibler un des projets qu’il a mis en branle comme étant sa plus grande fierté. «J’ai toujours pris beaucoup de risques, admet-il, mais des risques calculés. Je voulais faire avancer les choses.»
Il mentionne ainsi la fusion de 1985, la création du service de police, l’achat du cinéma de Terrebonne pour en faire le Théâtre du Vieux-Terrebonne et la fondation de ce qui allait devenir le Groupe Plein Air Terrebonne. «J’ai aimé tout ce que j’ai fait. Je ne regrette rien», assure l’homme avant de nuancer : «Je regrette juste de ne pas m’être marié plus vite!»
Un duo toujours complice
La première rencontre entre M. Forget et sa femme, Annette, a eu lieu alors qu’il avait 19 ans. «On était aux noces d’un cousin. Je ne la connaissais pas, mais je l’ai invitée à danser, puis à aller jaser dehors, raconte-t-il. Je lui ai demandé de la revoir ensuite, mais elle m’a mis dehors.» «On était trop jeunes et j’avais un ami», se défend sa conjointe, à l’autre bout de la table. «Un an après, elle courait après moi», ajoute l’homme avec amusement. C’est finalement en 1956 qu’ils ont uni leurs destinées, pour ne jamais se quitter ensuite.
«Je suis chanceux. J’ai toujours eu une femme patiente qui m’accompagnait où j’allais. Il y a toujours eu une bonne entente et du respect. On ne s’est jamais chicanés. Il y a une complicité entre nous», reconnaît M. Forget, qui a eu avec Annette trois filles, quatre petits-enfants et deux arrière-petits-enfants.
Lorsqu’il ne passe pas de temps en famille, qu’aime-t-il faire? «L’hiver, je joue deux fois par semaine aux quilles et l’été, deux fois par semaine au golf, dit-il. Autant je haïssais m’occuper des fleurs et jardiner avant, là, je suis maniaque! J’ai plus de temps. Je coupe mon gazon, je fais des réparations. J’ai lavé la maison au complet cette semaine!»
Cette maison est très bien entretenue. «Je me lève tôt, je prends mon café, je lis et j’admire la vue, affirme-t-il en pointant toutes les fenêtres de la cuisine qui laissent entrer une lumière rayonnante. Ici, c’est mes racines.»
Et ces racines sont aussi une partie des racines de la ville de Terrebonne.
GRAND TERREBONNIEN 2020 IRENÉE FORGET
Après Jocelyne Caron et André Shatskoff, l’ancien maire Irenée Forget a fait son entrée dans le très sélect club des récipiendaires de l’Ordre de Terrebonne lors de la troisième édition du Gala des Masson, le 3 décembre 2020.
La pandémie de COVID-19 a forcé la Ville à renoncer à tenir une mise en candidature et un gala à grand déploiement. Elle souhaitait néanmoins souligner le travail exceptionnel des organismes et des bénévoles de Terrebonne dans une cérémonie webdiffusée.
« Vous qui donnez tant à la communauté, c’est à votre tour de recevoir », a lancé en introduction le maître de cérémonie Alexandre Gagné.
Le maire de Terrebonne, Marc-André Plante, a ensuite pris la parole. « L’engagement inestimable des organismes permet au milieu de vie de se développer, de rayonner, d’être vivant et surtout, de faire l’envie des autres villes », a-t-il déclaré.
Grand Terrebonnien
C’est lors d’une présentation vidéo étoffée que l’identité du récipiendaire de l’Ordre de Terrebonne a été révélée. Il s’agit d’Irenée Forget, un ancien premier magistrat. Élu maire de Saint-Louis-de-Terrebonne pour la première fois en 1977, il a occupé ce poste jusqu’à la fusion avec Terrebonne en 1985. Il a ensuite été réélu en 1985, en 1989 et en 1993 avant de se retirer en 1997. M. Forget est notamment derrière la régionalisation de l’usine de filtration, devenue la Régie d’aqueduc intermunicipale des Moulins. Il a aussi fait l’acquisition du cinéma de Terrebonne, qui est aujourd’hui le Théâtre du Vieux-Terrebonne. Il a en outre contribué à la fondation de la Société de développement culturel de Terrebonne, en plus d’être le précurseur du Centre local de développement économique des Moulins et de participer à la création du Groupe Plein Air Terrebonne. « C’est un rassembleur, un leader. Un homme de principe, d’action et de décision », a notamment témoigné une de ses filles.
La patience n’était pas sa qualité première. Lorsqu’il était en attente d’une décision du gouvernement et que c’était trop long à son goût, il n’hésitait pas à faire un aller-retour à Québec pour aller parler directement aux acteurs concernés. « Je partais de chez nous vers 7 heures moins quart et je revenais pour 11 h 30 ou 12 h. On réglait ça rapidement », relate dans la présentation M. Forget, aujourd’hui âgé de 89 ans.
Fait cocasse, certains l’appellent toujours « monsieur le maire » aujourd’hui!