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Une occupation généralisée à toutes les classes sociales

Au temps de la Nouvelle-France, la pratique de la traite des fourrures avec les Premières Nations était une occupation ouverte à tous — des classes populaires à la noblesse.

Pour certains, cette activité lucrative se voulait temporaire et leur permettait, à l’issue de quelques voyages vers les "Pays d’en Haut" (la région des Grands Lacs), d’amasser un pécule suffisant pour établir une ferme et une famille sur les rives du Saint-Laurent.

Pour d’autres, cela devenait un métier et même une vocation. La demande de main-d’œuvre excédant amplement l’offre, le salaire moyen d’un "voyageur" était bien supérieur à celui d’un journalier agricole — au moins cinq à six fois et même beaucoup plus selon le niveau de compétence.

"𝗔𝘂 𝗺𝗼𝗶𝗻𝘀 𝘂𝗻 𝗰𝗼𝘂𝗿𝗲𝘂𝗿 𝗱𝗲 𝗯𝗼𝗶𝘀 𝗱𝗮𝗻𝘀 𝗰𝗵𝗮𝗾𝘂𝗲 𝗳𝗮𝗺𝗶𝗹𝗹𝗲"

Au Canada, l’habitant et le coureur de bois ne constituaient pas deux groupes distincts car bien souvent, il s’agissait de la même personne.

En 1680, l’intendant de la colonie, Jacques Duchesneau, estima à quelque 800 le nombre de coureurs de bois au Canada sur une population totale de 9 700 habitants, sans compter les autres qui partaient sans permis chaque jour vers l’ouest. Il jugea également qu’il y avait "au moins un coureur de bois dans chaque famille".

De son côté, l’historien québécois Jacques Mathieu évalue "qu’avant 1700, un homme adulte sur deux avait fait le voyage au pays des Autochtones de la région des Grands Lacs". Pour l’historienne Louise Dechêne, le commerce pelletier constituait au début du 18e siècle une occupation commune pour le tiers des hommes de la colonie. À Trois-Rivières, berceau des coureurs de bois, cette proportion atteignait 54 %.

Après la conquête britannique en 1760, ces chiffres continuèrent de croître. À la fin du 18e siècle, il est estimé que plus de 5 000 de ces voyageurs — pour la plupart Canadiens — opéraient à l’échelle de l’Amérique du Nord.

"𝗠𝗮𝗻𝗴𝗲𝘂𝗿𝘀 𝗱𝗲 𝗹𝗮𝗿𝗱" 𝗲𝘁 "𝗵𝗶𝘃𝗲𝗿𝗻𝗮𝗻𝘁𝘀"

Ces hommes étaient classifiés selon deux types principaux types. Il y avait les travailleurs saisonniers, appelés les "mangeurs de lard", qui faisaient carrière dans le transport des marchandises de traite et qui retournaient dans la colonie laurentienne chaque année.

Les autres, les "hivernants" — ceux qui dominaient la culture pelletière canadienne — se rendaient encore plus loin à l’ouest et où ils passaient l’hiver dans les villages autochtones, dans des comptoirs isolés ou dans des forts plus importants.

 

𝗗𝘆𝗻𝗮𝘀𝘁𝗶𝗲𝘀 𝗳𝗮𝗺𝗶𝗹𝗶𝗮𝗹𝗲𝘀

Face aux périls du voyage, choisir de bons compagnons était primordial. Pour cette raison, ces aventuriers avaient la propension de s’associer à des membres de leur famille, alors que souvent, des jeunes suivaient les traces de leur père et de leurs grands frères. De même, entre membres d’un même clan, on s’entraînait mutuellement dans l’aventure, formant des équipes avec beaux-frères et cousins.

Un vaste réseau de solidarité liait ainsi ces aventuriers et de génération en génération, de véritables dynasties familiales de coureurs de bois s’établirent dans la colonie. Mentionnons, parmi beaucoup d’autres, les Cardinal, les Deniau, les Hubert-Lacroix, les Tessier, les Trottier, les Saint-Yves, les Vandry, les Menard, les Reaume et les Gareau de la région de Montréal ou les Rivard de Batiscan.

De même, bon nombre de gens de métier dont on avait besoin dans les postes de l’arrière-pays — charpentiers, chirurgiens, forgerons, armuriers ou autres — pouvaient à leur guise commercer en parallèle avec les Premières Nations à titre de revenus complémentaires durant la saison hivernale.

Cependant, pour comprendre cette passion généralisée en Nouvelle-France pour la traite avec les Autochtones, les gains pécuniers n’expliquent pas tout. C’est tout l’environnement et le climat social qui prédisposaient les canadiens à vouloir dès la jeunesse se lancer un jour dans l’aventure de l’Ouest.

Crédit d’illustration : Frances Anne Hopkins

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